Deuil...
Deux semaines que je n’ai plus que mon Papa et mes deux sœurs. Le travail de deuil est bien difficile, nous souffrons tous les quatre beaucoup. La maladie reste au second plan. Mais, quelque part, j’ai tendance à me dire qu’elle nous permet de nous focaliser sur un objectif, ma guérison. Elle constitue en quelque sorte une bouée dans la mer de détresse dans laquelle nous baignons. Je ne sais pas si c’est une attitude très saine, mais c’est celle que j’ai adoptée, et, il me semble, les trois autres aussi, dans une moindre mesure.
Le deuil est un mécanisme qui permet de surmonter un moment critique de la vie : perte d’un être cher, déception amoureuse, etc… Il est le plus souvent associé à la mort : la période qui suit la mort d’un être proche.
Dans l’une des encyclopédies que j’ai consultées sur le sujet, le deuil est divisé en trois phases. La première est la phase de déni, de sidération. La mort de l’être cher n’est pas encore intégrée. Je me souviens encore, il y a deus semaines, le coup de téléphone de ma grande sœur m’annonçant la nouvelle. Comme on dit, « je ne voulais pas y croire. » On est shooté, on plane. On est dans un état second. Je me souviens avoir pris conscience à un moment que je tournais en rond dans ma chambre sans but et sans pensées.
La deuxième phase est celle de la détresse, de l’état dépressif. Il est accompagné souvent de douleurs physiques ainsi que mentales : perte de l’appétit et du sommeil, courbature, douleurs d’estomac, problèmes de concentration, perte de confiance en soi… Personnellement, je n’ai pas eu de gros problèmes d’appétit. De toutes manières, j’ai presque une obligation de manger lorsque je me sens bien, à cause de mon affaiblissement dû à la maladie. Par contre, le sommeil est vraiment très perturbé. Je me refuse à prendre des produits, type anxiolytique. J’absorbe déjà beaucoup de produit à cause de ma chimio, et ne suis pas fan de la multiplication des remèdes. Non, j’essaie juste de m’imposer une discipline, lever et coucher toujours à la même heure, en l’occurrence 22h30-7h, même le week-end (désolé mon coloc chéri, tu m’en veux pas trop ?) Question concentration, je ne sais pas si on peut être plus inefficace dans son travail que moi en ce moment. Les pensées divaguent complètement. Mais il est important, à mon avis, de garder le rythme du travail. Je me suis aperçu que l’on pouvait se faire donner un arrêt de travail très facilement par un médecin complaisant, mais ce n’est pas nous rendre service. Que va-t-on faire ? Rester cloîtré dans son appart, à gamberger toute la journée ? Non, à mon avis, et c’est ce que j’applique en ce moment, il faut sortir, voir du monde, et continuer son activité même à dose réduite.
La troisième phase est dite de restructuration. On essaie de reprendre goût à la vie. Personnellement, il me semble que je mélange phases 2 et 3. A certains moments, je me sens plutôt bien, heureux de vivre. Mais le soir venu, avant de m’endormir, lorsque je me retrouve seul avec moi-même, difficile de ne pas penser. Penser à ma Maman. Penser aux bons moments que nous avons eu ensemble, et surtout que nous n’aurons plus jamais. C’est fou comme le simple sourire d’une personne peut vous devenir indispensable une fois que vous saurez que vous ne l’aurez plus… Quoi qu’il en soit, l’équilibre me parait vraiment difficile à retrouver, mais je sens que nous seront tous les 4 assez forts pour y arriver. En tous cas, nous avons fortement resserré le noyau familial. Un bon premier réflexe.
Bien sûr, la mort peut être une délivrance pour l’entourage, et notamment dans le milieu de la maladie. Ce n’était pas mon cas, et la brutalité avec laquelle j’ai subi cette disparition m’affecte encore énormément. Le travail de deuil se finira-t-il un jour ? Ce long travail d’acceptation aura-t-il une conclusion ? Pas sûr…
Ce que je sais, c'est que la mort ne détruit pas l'amour que l'on portait à ceux qui ne sont plus. Je le sais parceque, tous les jours, je vis avec les miens...
Ce que je sais aussi, c'est que la vie doit avoir un sens. Ce que je sais encore, c'est que l'amour, le bien, la fidéLité et l'espoir triomphent.
Tout cela, je le sais, je le crois...
Martin Gray